La naissance est un événement profondément intime et familial. Pour les couples qui n’adhèrent pas à une vision médicale de l’accouchement et qui au contraire conçoivent l’enfantement comme un processus naturel et inscrit dans le quotidien de la vie, accoucher en présence des enfants plus vieux est parfois une évidence intuitive.
J’ai moi-même accouché en présence de mes enfants à deux reprises et j’en garde des souvenirs absolument magiques. Dans notre vision de la naissance à mon chéri et moi, le fait que nos enfants soient là quand on accueille un nouveau membre dans notre famille est tout simplement naturel. Notre intuition nous dit qu’ainsi, le mystère est résolu, l’évidence parle, la vérité est incarnée et la famille s’agrandit.
Pour l’enfant, le fait de voir sa mère accoucher et le nouveau-né naître vient inscrire en lui une authentique vérité quant à l’origine de son existence. Après ça, il n’y a (presque) plus de mystère quant à l’origine des bébés et de sa propre venue au monde. Quand on parle à un enfant qui a vu sa mère accoucher, on constate à quel point la naissance n’est alors pour lui qu’un événement parmi tant d’autres, presque une journée bien ordinaire !
Face à l’humain de l’ère moderne, programmé à craindre les naissances, l’enfant qui a vu sa mère accoucher nous rappelle qu’il n’y a pas de quoi faire tout un plat de l’enfantement. Comme si cet acte magique et miraculeux que la culture médicale nous force à craindre redevenait banalement inscrit dans le quotidien de la vie.
Évidemment, la présence des enfants à l’accouchement n’est pas un but en soi. D’abord faut-il que la femme souhaite leur présence et que ceux-ci en aient envie. Avant d’aller plus loin et d’aborder comment prépare un accouchement en présence de nos enfants, je crois qu’il importe de détricoter quelques mythes à ce sujet.
Quelques mythes sur la présence des enfants à l’accouchement
On entend souvent des phrases comme :
« Tu vas le traumatiser ! »
« Tu ne pourras pas te concentrer comme il faut sur ce que tu as à faire. »
« La vue du sang va le marquer à jamais ! »
« Et s’il y avait une urgence ? »
Bref, la plupart de ces questions sont des fruits de la culture de la peur qui entoure les naissances.
La première, « Tu vas le traumatiser ! » vient certes du fait que la plupart des humains sont eux-mêmes traumatisés de leur propre naissance. Pour ceux qui émettent un tel commentaire, naissance égale souvent danger et donc trauma, on comprend alors que pour eux l’idée qu’un enfant assiste à un accouchement est inconcevable. Or, la vérité c’est que pour les enfants qui voient leur mère accoucher, l’accouchement est souvent vécu comme quelque chose de tout à fait normal, qui est souvent assez « long », et au bout duquel il en sort un bébé.
« Tu ne pourras pas te concentrer comme il faut sur ce que tu as à faire. » Quand les enfants sont présents à l’accouchement, on conseille qu’il y ait une personne ressource dont le rôle exclusif, c’est d’être là pour eux. Cette personne doit avoir un très bon lien avec l’enfant et évidemment, il faut qu’elle endosse l’évidence qu’un accouchement est un acte normal et sécuritaire. Si vous avez une telle personne sur place avec vos enfants, vous n’aurez pas à vous préoccuper s’ils ont faim, ou s’ils vont encore bien.
Ce que j’ai remarqué par mes propres expériences de femme qui accouche, mais aussi comme sage-femme, c’est que la présence d’enfants est au contraire très encourageante pour la femme qui accouche. Je me souviens de la petite main de ma fille à mon dernier accouchement, elle m’invitait à rester calme et molle pendant la contraction. Je ne voulais pas lui faire mal et la serrer trop fort. Pendant la contraction, je me concentrais sur sa douceur, sa pureté, et ça m’aidait énormément.
Pour moi, avoir mes enfants autour me forçait à être brave. Je voulais leur montrer à quel point j’étais forte et capable d’accoucher. Ils me donnaient énormément de force et chacun de leurs mots et sourires, si purs et naïfs, m’encourageait à plonger davantage.
« La vue du sang va le marquer à jamais ! » Ici encore, la peur et la crainte. C’est vrai qu’il y a un peu de sang dans un accouchement, et c’est vrai qu’il y a toujours le risque de faire une hémorragie. Mais la vérité, c’est que la plupart du temps, il y a très peu de sang et qu’une fois rendu à l’étape où il y a un peu de sang dans un accouchement, le bébé est arrivé et les enfants n’en ont que pour lui ! Le sang n’est qu’un petit détail dont il faut cesser d’avoir peur. De plus, les enfants qui ont été préparés à assister à la naissance le savent, « Après la naissance du bébé, quand maman va sortir le placenta, il y aura un petit de sang, mais tu verras c’est normal, c’est un signe que l’accouchement est presque fini. »
« Et s’il y a une urgence ? » C’est surement une des raisons principales pourquoi il y a si peu de femmes qui accouchent en présence des enfants plus vieux, la crainte qu’il y ait une urgence. Parce qu’il n’y a rien d’aussi imprévisible que la vie, et que donner la vie c’est aussi donner de l’évidence de sa mort certaine, ce serait être très naïf que de prétendre que rien ne puisse arriver de mal parce que les enfants sont là.
La très grande majorité du temps, les femmes accouchent, les bébés naissent, suivis de leur placenta, tout simplement. Mais parfois, « shit happens » et il faut transférer, agir vite, intervenir. Bref, il y a une urgence. C’est là que la personne ressource pour les enfants prend toute son importance. Devant un tel changement de scénario, elle devra emmener l’enfant en lieu sûr, trouver des mots simples pour le rassurer et une bonne idée pour lui faire penser à autre chose en attendant que l’urgence soit réglée.
Personnellement, j’ai toujours senti que le fait que mes enfants étaient autour ne laissait pas la place à ce que les choses se passent mal, qu’ils étaient un peu comme mes anges gardiens. Je n’ai d’ailleurs, comme sage-femme, jamais vu une urgence en présence d’enfants. Je sais toutefois que ça pourrait arriver et c’est pour ça qu’il faut bien choisir la personne qui est là pour eux.
Cette personne doit avoir de la sensibilité, tout en étant solidement ancrée. Si elle sent à tout moment que l’enfant ne va pas bien, lui proposer d’aller au parc, d’écouter un film, de jouer à un jeu, ou de lire un livre. Si elle sent à tout moment que l’enfant est « de trop » pour la situation, lui proposer subtilement une aventure hors de la maison, ou du moins de la pièce.
Comment préparer les enfants ?
Leur demander!
La question est simple, si l’idée vous enchante demandez-leur : « Aimerais-tu être là quand ton petit frère ou ta petite sœur va naître? Aimerais-tu ça voir sortir le bébé? »
Leur réponse est souvent très instinctive : « OUI ou NON. »
Amenez-le voir la sage-femme
Quand une femme me dit « Je veux que mes enfants soient présents à l’accouchement », je lui dis d’amener ses enfants à la prochaine visite avec moi. À cette visite avec eux, je me présente, je valide leur envie d’être là, et je leur raconte la naissance.
« Tu verras, maman va faire des gros sons et prendre toutes sortes de positions. Elle va faire le « gros ours » comme ça… » Puis, je mime l’accouchement ! Souvent, ils rient, ils me trouvent drôle. J’ai gagné leur confiance ! Je leur montre l’accouchement avec le bébé et le bassin, puis le placenta. Et bien sûr, je leur propose de lire le livre « Ma mère c’est la plus forte – Une histoire de naissance. »
Je ne suis pas du tout à l’aise d’aborder la présence des enfants lors d’une naissance à l’hôpital. Ce billet s’adresse aux femmes qui préparent une naissance à la maison ou en maison de naissances. Si vous souhaitez amener vos enfants à votre accouchement à l’hôpital, je vous encourage à en parler avec votre médecin et votre accompagnante à la naissance.
Montrez-lui des vidéos d’accouchement.
Je vous ai fait une petite liste de vidéos que j’ai trouvées sur YouTube, mais sachez qu’il en a des millions d’autres si vous souhaitez faire vous-même une recherche. Tapez les mots-clés « Home birth », « Home water Birth », « Family birth », «unassisted homebirth »… Vous allez découvrir tout un monde de possibilités ! Et vous verrez à quel point vous n’êtes pas seule au monde à croire qu’accoucher en famille est l’intuition à suivre.
- Un court vidéo (romantique) sur une naissance tout en douceur : Ici
- Une naissance en famille, en photo :Ici
- Une autre naissance en famille: Ici
- Avec plus de 6 millions de vues, je devais vous la montrer! Une naissance en famille, dehors, à la rivière! Ici
- Ou celui-ci, avec plus de 3 millions de vues. Une femme qui accouche seule, debout Ici
Faites un plan B et C
Même si le plan A c’est que votre enfant soit présent, il se peut que le jour « j » il change d’avis. Assurez-vous que la personne qui doit s’en occuper peut aussi l’amener chez elle. Et si vous êtes du genre extraprévoyant, trouver même un plan B ou C, au cas où cette personne ait un contretemps l’empêchant d’être là.
Il se peut aussi que ce soit vous qui devant l’intensité de la naissance ne souhaitez plus la présence de vos enfants autour. Expliquez-leur d’avance que cela pourrait arriver et laissez-vous le droit de changer d’idée.
Et si c’est la nuit ?
Je suis de celle qui croit que l’accouchement se vit dans l’instant présent. Si vous accouchez la nuit et que les enfants dorment, appelez quand même la personne qui doit être là pour eux. Seulement, réveillez seulement les enfants (si ceux-ci sont assez vieux et que c’est leur souhait) quand la naissance est imminente. Ils se réveilleront (à moitié !) pour voir le bébé naître.
Selon leur âge, il se peut qu’ils ne se rendorment pas avant plusieurs heures, mais bien souvent ils iront se recoucher peu de temps après la naissance, sans trop réaliser ce qui vient d’arriver !
Ayez le cœur ouvert et Have fun !
Parce qu’on peut bien avoir des souhaits, mais qu’on ne peut rien prévoir d’avance dans la naissance, il importe d’avoir le cœur ouvert quand on s’en va accoucher. Du coup, ça permet aussi au col de mieux dilater ! Cela s’applique donc au projet d‘accoucher en présence des enfants.
Laisser la naissance se dévoiler dans le quotidien familial est certainement le plus beau cadeau que l’on puisse se faire.
Si c’était à refaire ?
Si j’avais encore cette chance d’accoucher un jour, j’accoucherais en famille si c’est ainsi que se dévoilait mon histoire. Je ne peux pas concevoir la naissance autrement. C’est ma vision de la vie. Cependant, je sais bien que tout pourrait se dévoiler autrement et je m’en laisserais le droit.
Par exemple, si je sentais que je veux accoucher seule avec mon chéri, c’est ce que je ferais. La vérité, c’est qu’on ne sait vraiment jamais qu’une fois rendue là.
Si ça vous intéresse, j’ai interviewer mon chéri à ce sujet. Voici sa réponse à mes questions. Que je l’aime cet homme!
Le 4 février 2019, j’ai enfanté pour une quatrième fois… en famille!
En effet, le 4 février dernier j’ai eu mon bébé arc-en-ciel. Mon deuxième fils, Emrys Wild, est né librement en famille. Une naissance simple, instinctive et puissante. Tous mes enfants étaient là. Il y avait aussi une bonne amie, mère de six enfants elle-même, qui était là pour s’occuper d’Emma (6 ans).
Mes grands (14 et presque 18 ans) avaient eu l’ordre de rester à l’écart. Je ne souhaitais pas enfanter devant eux. Pas cette fois. Ils ont pu venir quand tout était terminé, c’est-à-dire après le placenta!
Cette fois-ci mon souhait de départ était d’enfanter seule sans les enfants, mais la vie en a décidé autrement. Quand on accouche à la maison il faut savoir faire avec la dynamique familiale qui l’anime, et Emrys est arrivé entre 17 et 19 heures! Bref, en plein dans l’heure de pointe!!!
La résilience fût mon alliée et tout s’est bien passé. J’accouchais avec mon chéri dans ma pièce blanche (on avait mis un rideau dans l’arche pour garder l’intimité) et j’entendais Emma rire aux éclats avec Françine dans la cuisine. C’était parfait.
Anecdote qui vous servira si vous avez des ados!!!
J’ai appris une chose que je n’avais pas vu venir avec cette accouchement en famille et je veux bien vous en faire profiter…
Quand mes grands (14 et presque 18 ans) sont descendus pour voir le bébé après la naissance, j’étais encore couchée par terre et couverte des traces de la naissance. Bébé était attaché au placenta et apprivoisait mon sein pendant que moi je respirais mes premières tranchées.
Et bien, ça n’a pas pris plus de deux minutes après l’arrivée de ma 14 ans qu’une photo de moi (nue) et bébé était envoyée à sa cousine du même âge via Instagram!
La minute suivante elle mettait le téléphone en Facetime avec la mère de sa cousine (soeur de mon chéri) devant le visage de Martin. Nul besoin de vous dire que ça ne l’a pas trop enchanté…
Nous qui pensions cacher la naissance au monde entier pendant 2-3 jours (surtout qu’il était né à 39 semaines), notre plan était foutu.
Bref, j’ai appris une chose avec cette troisième naissance en famille: quand on a des ados il faut aussi les sensibiliser à garder l’intimité de la naissance versus les réseaux sociaux.
Je sais bien que ma fille n’étais pas mal intentionnée en faisant cela, qu’elle était pleine de joie, mais disons qu’on s’en serait passé! Si mon expérience peut au moins servir à sensibiliser d’autres ados et famille, et bien tant mieux!
Il n’en demeure pas moins que je crois qu’enfanter en famille est merveilleux, même si ce n’était pas mon premier souhait pour cette quatrième naissance et que c’est arrivé malgré tout !
Et vous, avez-vous accouché en présence de vos enfants?
Merci pour cet article Karine. Ca nous a fait bien discuté mon mari et moi sur la présence de notre fille de 18 mois à mon prochain accouchement à domicile 🙂 bonne continuité. ( et l’interview avec ton chum à bien fait rire Stéphane! )
D’abord bravo, pour ce blog. La question d’accoucher en présence de mon ainée ne s’est présentée qu’une fois (logique!) et j’ai adoré qu’elle ne soit pas là. J’ai accouché seule avec le papa, et j’ai aimé ça, cette intimité, être juste à deux, puis juste à trois. Je trouve que les naissances où les enfants sont invités sont très touchantes, tout comme celles ou des amies viennent soutenir la femme par leur simple présence. J’adhère vraiment, conceptuellement, intellectuellement. Et j’ai aimé aussi l’article sur l’accouchement “en famille”, terme effectivement beaucoup plus parlant que “accouchement non assisté”. Mais en accouchant, je n’ai pas du tout eu envie de ça. Ca m’aurait complètement bloqué que ma fille reste là, et je n’aurai pas eu envie non plus qu’une personne même mon amie la plus proche vienne dans la maison pendant que j’accouche. C’est quand il a été décidé qu’elle partait pour deux jours, avec ma meilleure amie justement, que j’ai pu rentrer dans mon accouchement, traverser le voile, partir. Je ne pouvais pas avoir à penser à elle, me demander si elle était bien, si elle n’avait besoin de rien. Je n’aurai pas voulu devoir sembler être forte, me demander si je ne lui faisais pas peur en rugissant comme ça, je n’aurai pas voulu devoir la rassurer, l’entourer. Il n’y avait pas la moindre place pour ça. Par contre, il y a avait la place pour tout l’amour, la tendresse, la sensualité du couple. Puis pour être tout à ce petit bout, le découvrir, avant qu’il ne rencontre sa soeur. Oui, il avait déjà un jour quand ils se sont rencontrés. C’était un choix différent. On ne peut pas tout avoir, tout vivre ! Si c’était à refaire? Je n’en sais rien. Mon petit doigt me dit qu’il y a de bonnes chances pour que je fasse pareil !
Bonjour karine, jai poste sur cet article et je vois que cest mon mail qui apparait et pas mon pseudo, pour des raisons danonymat cest important pour moi sue mon mail anpparaisse pas, merci beaucoup de modifier ca! Bonne journee,
C’est réglé! Pas de souci. Je comprends tout à fait. Au plaisir. K 🙂
Bonjour Karine et merci pour ce partage d’expérience encore une fois superbe à lire. Néanmoins je me permettrais une petite question, pourquoi vous ne vouliez pas que vos grands soient présents?
Merci de votre réponse! A bientôt
J’ai accouché à la maison trois fois et à chaque fois, mes ainés étaient de plus en plus vieux! On ne parle pas assez de la présence de ‘grands’ enfants lors de l’accouchement. Il y a très peu, voir aucun, articles/livres sur la préparation à faire avec eux. Les yeux et l’innocence d’un tout petit n’a rien avoir avec ceux des plus vieux! Ici, au dernier, mes enfants avaient 7-10 et 12 ans. Ils ont vécus l’expérience de façon bien différente, surtout mes deux plus vieilles. Elles ont adoré ce réveillé en pleine nuit et venir sur le bout des pieds confirmer leurs sentie d’une naissance imminente, elles ont baignées dans les hormones de l’amour pendant le travail et elles ont fait le choix éclairé et respecté de rester à l’écart lors de la naissance. Chacun de mes enfants étaient libres de venir et de sortir à tout moment. Mon petit de 7 ans a eu le bonheur de couper le cordon avec son papa… mes hommes qui prenaient le relais de cette vie qui était en moi depuis presque 10 lunes… c’était vraiment magnifique. La confiance et l’ambiance sereine fait toute la différence pour les enfants et les ados.
Bonjour, je vais accoucher bientôt.
Mon premier enfant a 18mois.
Nous avons organiser pour que quelqu’uns soit là pour lui. Pour si il veut rester avec nous. Ou faire autre chose.
Je sens en moi l’envie de lui montrer cette arrivé d’un nouveau membre dans notre famille.
Mon compagnon a un peu peur qu’ils entendent les cris. Qu’ils ne comprennent pas que maman ne soit pas dispo pour lui!
Croyez vous qu’il est trop petit pour se rendre compte? Y a t il un âge à partir duquel on se rend plus compte?
J’aimerai Faire au mieux pour lui!
Merci de vos retours
Merci pour votre partage d’expérience. Un de mes 5 enfants a exprimé de lui-même la demande d’assister à la naissance de son petit frère d’ici quelques semaines. Il a 9 ans. Je viens de contacter la sage-femme cadre afin de tenter une première approche en ce sens, sachant que c’est quelque chose de totalement exclus – jusqu’à présent – dans l’hôpital prévu. On verra…