En effet, ça se peut aimer accoucher.  Et si c’est votre cas, vous n’êtes pas toute seule. Moi-même j’aime accoucher et l’idée que ça n’arrivera plus jamais est un deuil perpétuel. Il me suivra aussi longtemps que j’ovulerais j’ai l’impression.

Certains diront de nous qu’on est masochistes et qu’on aime avoir mal, allant même jusqu’à dire qu’on est pas normales. C’est qu’ils n’ont pas encore compris que la douleur de la naissance est normale et que bien qu’elle fasse mal, on ne parle pas du même «mal» que si on a une pierre au rein, une appendicite, ou un kyste ovarien qui éclate.

Nous, on sait qu’accoucher est incomparable à une douleur qui est là pour nous dire de chercher de l’aide parce qu’on pourrait mourrir. On sait à quoi elle sert cette douleur de l’enfantement. On sait qu’elle est là pour ouvrir notre col et faire descendre notre bébé tant attendu. On l’embrasse cette douleur et elle devient intensité, force et magnitude. Sur le chemin de la rencontre avec notre bébé, on la chante cette douleur, une contraction à la fois.

«Je sais pas comment tu fais pour accoucher chez toi sans épidurale !»

C’est ce qu’ils nous disent,  ceux qui ne nous comprennent pas. Et nous de se demander:

«Comment font-ils eux pour aller accoucher à l’hôpital, alors qu’ils sont en parfaite santé?»

Deux paradigmes. Deux visions différentes.

Les femmes qui aiment accoucher savent ce dont elles sont capables face à l’enfantement. Elles ne veulent pas qu’on les prenne en charge ni qu’on leur dise quoi faire. Une présence bienveillante leur suffit. Une qui leur rappelle si jamais elles doutent en chemin, que tout est normal et qu’elles le font, qu’elles accouchent.

Je me souviendrai toujours de ce moment au début de mon troisième accouchement, quand après seulement une demi-heure, l’intensité était déjà très forte. J’étais accrochée au foulard que j’avais mis au plafond pour me soutenir et je me suis dit:

«Oh my! Ça fait dont bien mal. Pourquoi j’aime ça déjà accoucher? Je suis complètement folle de dire que j’aime ça à tout le monde !»

Et là je me suis parlé. Je me suis rappelé à quel point je voulais mon bébé et que j’avais hâte d’avoir des contractions, pour leur dire «OUI» et les embrasser dans leur puissance. Je me suis dit:

«Okay, Go ma grande! Tu n’as pas le choix et tu vas le faire.»

Alors j’ai plongé. Je me suis laissé aller dans mon vortex de naissance et bien que c’était l’accouchement le plus difficile des trois, j’ai aimé cet accouchement et je recommencerais demain matin si je pouvais.

 

L’ocytocine, cette hormone de l’amour

Je soupçonne que ce soit l’ocytocine la grande responsable de nous, les femmes qui aimons accoucher. Pendant l’accouchement, l’ocytocine (hormone de l’amour) coule a flot dans nos veines pour faire contracter l’utérus. À la poussée, ce taux monte encore plus haut, de sorte qu’une fois le bébé né, jamais dans notre vie on en aura autant dans nos veines.

Imaginez votre meilleur orgasme à vie… celui-là où vous ne pouviez plus bouger après, celui-là où vous étiez engourdie jusqu’aux mâchoires (!). Multipliez ces sensations fois mille, ça vous donnera une idée du taux d’ocytocine qui circule dans le sang de la femme (et du bébé) après un accouchement physiologique.

Toute cette ocytocine est là pour qu’on tombe en amour avec notre bébé (et lui avec nous), de sorte qu’on soit prête à tout pour lui. Comme ne plus dormir une nuit complète pour les cinq prochaines années! La nature est tellement bien faite.

Du coup, sous l’effet de cette abondance d’ocytocine,  je pense que c’est là qu’on tombe en amour avec le processus de l’accouchement. Quand on a oublié à quel point ça fait mal !

Elles sont rares les femmes qui disent après un accouchement qu’elle recommencerait le mois prochain (bien que j’en ai déjà vues !), mais, avec le temps, la distance qui nous sépare de l’accouchement et les souvenirs positifs qui s’y rattachent, on réalise que finalement on a vraiment aimé ça accoucher.

Que jamais on ne s’est sentie aussi puissante, forte et divine. On prend conscience de notre chance d’être une femme et de pouvoir accoucher. On se dit que si c’était à refaire, on ferait ça, on accoucherait là, avec une telle, ou même toute seule ! On est devenue une «junkie de l’accouchement» !

Ainsi, en tissant cet accouchement encore tout frais, on pense à la prochaine fois. Tant qu’il reste encore une prochaine fois.

Crédit photo: Emma Rodrigues Photography.